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Management d’exploitation : vision d’ex-militaires

  • Clément TETU
  • 8 nov. 2024
  • 7 min de lecture



Que ce soit dans un entrepôt, un hub, une agence ou encore une plateforme, les métiers de l’exploitation valorisent les talents pragmatiques disposant d’un véritable sens pratique et d’un goût prononcé pour l’opérationnel. Le management d’exploitation ne nécessite pas fondamentalement d’une expertise technique : les opérations quotidiennes requièrent avant tout du leadership, une forte adaptabilité ainsi qu’une bonne organisation.


Ainsi, les “soft skills” développées au sein des armées peuvent faire sens pour des postes de Chefs, Responsables ou Directeurs d’exploitation où la fiabilité, l’état d’esprit et la rigueur sont de mise. Analysons, à la lumière d’expériences militaires, les compétences recherchées pour ces activités d’exploitation.

 


Esprit d'équipage

 

Qu’ils rentrent au sein de l’institution en qualité de militaire du rang, de sous-officier ou d’officier, tous les militaires sont amenés assez rapidement dans leur carrière à encadrer du personnel. Un jeune chef d’équipe aura dès 20 ans la responsabilité de jeunes recrues. Son action revêtira pour ses coéquipiers autant d’importance que celle d’un instructeur pendant les classes et ce, pour assurer leur montée en compétences sur le terrain.


Afin d’avancer dans un objectif commun, un militaire se doit d’appliquer un management de proximité pour comprendre ce qui fait avancer ses troupes et maximiser l’engagement de chacun des membres de son équipe, de son groupe ou de sa section. En faisant ainsi, le militaire peut plus facilement déléguer et responsabiliser chaque échelon, faisant très souvent qu’en opération, la fonction prime sur le grade. Ce sera celui qui sera en début de colonne d’assaut qui décidera de la manière de passer une porte, et le reste de l’équipe s’articulera en fonction : c’est en mission que l’on comprend la différence entre “faire confiance” et “donner (sa) confiance”.


Les métiers de l’exploitation sont avant tout fédérateurs : l’état d’esprit de chaque maillon de la chaîne doit être considéré car le succès n’est possible que par la réussite de tous. Ainsi, que ce soit pour une livraison, un chantier ou une maintenance, chaque métier devra interagir en s’adaptant aux comportements de l’autre afin de favoriser une cohésion globale et fidéliser les équipes. C’est d’ailleurs pour cela que les objectifs y sont très souvent individuels ET collectifs.



Planification


Une opération militaire nécessite le déploiement de plusieurs moyens. Prenons l’exemple d’un “assaut mer” qui, comme le montre cette vidéo [Opérations Spéciales] Assaut sous haute intensité – Exercice RHÉA), voit différents vecteurs aériens et maritimes entrer en action. Le succès d’une opération repose pour beaucoup sur le fait que chacune des manœuvres (descente en corde lisse depuis l’hélicoptère, montée sur le navire depuis une embarcation rapide, etc.) soit réalisée dans le bon timing. La façon dont les choses sont structurées sur le plan opérationnel en amont maximisera l’effet de surprise le jour-J.


Bien que le souci du détail puisse renvoyer une image de complexité, une planification militaire est finalement assez simple en matière d’approche. Il s’agit de coordonner des personnels complémentaires issus de différentes spécialités et dont chacun aura un rôle bien défini (pilotes, commandos, tireurs embarqués, etc.) ainsi que des matériels indispensables à la conduite des opérations : moyens de transport, matériels d’effraction, équipements de protection, etc. Élément incontournable à la planification, le briefing permettra quant à lui à ce que chacun comprenne parfaitement ce qu’on attend de lui et dans quel contexte il s’inscrit.


L’exploitation est un domaine d’activité où le respect des délais est le nerf de la guerre car des engagements sont à respecter vis-à-vis des clients. Afin d’être le plus efficace pour la réalisation des missions quotidiennes, le maître-mot est la coordination des moyens matériels (ex. machines, EPI, gerbeurs électriques) et humains et ce, au travers par exemple d’une gestion anticipée des plannings en fonction des pics de charge. A tout niveau, le sens de l’organisation, la rigueur, le suivi des consignes de son N+1 ainsi que l’écoute de ses équipes (lors de la survenance d’un incident impactant toute la chaîne par exemple) sont fondamentaux pour que le bal se déroule dans les délais. 

 


Gestion des imprévus

 

Avant un déploiement, les unités militaires passent en amont par une phase de mise en condition opérationnelle (MECO) visant à valider leur aptitude à réaliser les missions qui leur incomberont. Ces tests de capacité sont réalisés de telle manière que tous les exercices de simulation sont truffés de facteurs aggravants (ex. un blessé), afin d’entraîner les équipes à être les plus réactives pour trouver des solutions en vue de continuer à remplir les objectifs de la mission. L’expression “il ne faut pas confondre vitesse et précipitation” est très souvent employée en instruction. Elle y a tout son sens : agir dans l’urgence ne rime pas avec affolement, mais au contraire avec une bonne gestion du stress.


Bien qu’un imprévu soit en l’espèce, difficile à prévoir, une des premières manières pour être à l’aise face à cela est de s’y “préparer”. Dès la phase de planification, les facteurs de risques pouvant mettre à mal le succès de la mission, appelées “cas non-conformes”, sont identifiés pour prévoir de possibles parades. Certains imprévus peuvent être connus du fait de leur récurrence (ex. un retard ou une panne). Le second élément est la créativité : en autonomie en haute mer ou en plein désert, il faut en cas de problèmes composer avec des ressources limitées. Au-delà d’y voir des rois du système D, il faut analyser cela par le fait que les militaires ne peuvent subir l’imprévu, ne serait-ce que pour leur intégrité physique.


La lucidité est incontournable dans les métiers de l’exploitation car les problèmes y font finalement partie du quotidien : un matériel qui casse, un collaborateur injoignable, etc. Face à cela, l’équipe d’exploitation se doit d’analyser la situation et d’avoir continuellement une approche “problem solving” pour trouver et mettre en œuvre des solutions efficaces. Le fait de devoir respecter des engagements vis-à-vis de clients (sous peine de pénalités financières par exemple) fait que le dénominateur commun des personnes performantes dans ces métiers est la proactivité face aux imprévus. 



Amélioration continue

 

L’effet de surprise est fondamental pour le succès d’une opération car c’est avec ces quelques secondes d’avance que l’on pourra prendre l’ascendant sur son adversaire. Pour ce faire, les armées sont conditionnées dans une forme de culture de la performance et de recherche permanente d’efficacité. Cela passe d’une part par une remise en question perpétuelle de ses modes opératoires (ex. manière avec laquelle rentrer dans une maison à investiguer), le conditionnement des équipements (ex. choix du matériel devant être directement accessible dans un véhicule) mais aussi sur ses propres capacités (suis-je toujours au niveau pour que mes camarades me donnent leur confiance ?).


Cette culture repose d’autre part sur le “retour d’expérience”. Pour toutes spécialités, chacune des actions est répétée et répétée (“drillée”) en entraînement afin que cela devienne un réflexe le jour-J. Chaque occurrence, qu’elle soit en simulation ou dans un contexte opérationnel, est systématiquement ponctuée par une réunion de l’ensemble de l’équipe pour revenir sur ce qui a fonctionné, mais surtout sur ce qui peut être optimisé pour que la méthode soit la fois d’après encore plus efficace.


Les opérations dans les métiers de l’exploitation sont finalement souvent récurrentes : pic de charge des fêtes de Noël dans la logistique, montage d’une scène dans le cadre d’un événement, etc. Dans ce contexte, l’approche empirique est particulièrement présente dans les actions quotidiennes : en cas de problème, une piste de solution est testée puis selon les bienfaits apportés, elle est abandonnée, retenue ou réajustée pour la suite. Par le biais de débriefings entre autres, l’objectif est d’analyser continuellement les forces et les faiblesses d’un centre de profits pour mettre en œuvre les actions correctives nécessaires et veiller à la rentabilité des opérations. 



Respect des procédures et sécurité

 

Bien que fictif, le film “Le Chant du Loup” est parlant pour comprendre la nécessité au sein de la Marine Nationale de suivre des procédures lorsque l’on agit au sein d’un dispositif. Les process définissent comment chacune des entités d’un navire (artilleurs, manœuvriers, etc.) ou d’un groupe aéronaval va pouvoir et devoir œuvrer. Ainsi chaque métier suit scrupuleusement les consignes car il suffit qu’un seul élément sorte du cadre pour mettre à mal l’organisation globale.


Ces procédures sont bien entendu éprouvées en amont (ex. lors des MECO) pour s’assurer de leur efficacité et en particulier pour la sécurité des personnels. Deux des premiers fondamentaux qu’apprennent les jeunes recrues arrivant dans une unité combattante sont la notion de règles d’engagement et les 4 règles de sécurité au tir (voir dernier paragraphe de ce lien). Les militaires interviennent dans une réglementation juridique donnée et visent à toujours agir en sécurité pour eux mais aussi pour les autres.


Les activités d’exploitation, comme la gestion d’entrepôts, voient différents métiers s’articuler les uns avec les autres (caristes, manutentionnaires, etc.) et dont chacun présentent des risques. Le respect des règles en vigueur (comme les zones d’accès piéton ainsi que des procédures limitant le périmètre d’action de chacun, sont indispensables pour que l’ensemble du dispositif interagisse en toute harmonie.



Conclusion


Il serait malvenu de faire des généralités sur les militaires. Pour autant, l’armée permet à ceux passant un séjour plus ou moins long en son sein de développer un socle commun de compétences et de manière de procéder.


Dans un contexte business tendu où les soft skills prennent un poids parfois plus important que les études,. En effet, les notions de rentabilité ou encore de droit du travail peuvent être apprises sur au fil de l’eau : la connaissance technique s’acquiert tandis que le savoir-être (anticipation, coordination, etc.) est quant à lui, ancré dans la personnalité de chacun.


Un profil adorant être sur le terrain, sachant effectuer un reporting “bottom-up” (rendre compte en somme), communiquant pour valoriser ses équipiers et pensant son activité au travers du “groupe”, pourra être un appui fort pour une société d’exploitation.

 
 
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